» Aucun des membres de la société où ces poèmes ont été recueillis n’est capable de les réciter tous, ni même une notable partie. Mais il en sait l’existence, et que quelqu’un dans le monde, en définitive familier, qui l’entoure les connaît et les dit.  » Ces poèmes épiques, politiques, hagiographiques, gnomiques de l’ancienne société berbère de Kabylie (celle des tribus et des cités) ont été recueillis  » avant que la mort ne les happe « . Des marabouts de Kabylie du XVIe siècle à la domination turque puis coloniale jusqu’au début du XXe siècle, la poésie berbère véhicule les canons et les idéaux d’une culture ancestrale. L’esthétique propre de cette tradition orale est ici consignée, pour sa propre sauvegarde, par écrit :  » Le temps n’est plus où une culture pouvait se tuer dans l’ombre, par la violence ouverte, et quelquefois avec l’acquiescement aliéné des victimes. En ce siècle de monde rapetissé, où les contraintes d’une civilisation technicienne tendent à niveler la vie des hommes, désormais la somme des variantes civilisationnelles fait peau de chagrin ; il n’est pas vain d’en pouvoir sauvegarder le plus grand nombre.  »

Mouloud Mammeri.

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